• Élection contestée de Salvador Allende

     

     

    SALVADOR ALLENDE

     

    Le 4 septembre 1970, le socialiste Salvador Allende est élu président de la République du Chili. Il n'obtient cependant que 37% des voix avec une coalition fragile qui va du centre à l'extrême-gauche maoïste. Le reste des voix se partage entre ses deux adversaires de droite.

     

    L'hostilité de l'opposition au président ne cessera de se renforcer jusqu'à sa mort tragique, trois ans plus tard…

    André Larané

     

     

    Un médecin progressiste et franc-maçon

     

    Né le 26 juin 1908 dans une riche famille de la bourgeoisie franc-maçonne du Chili, Salvador Allende suit une formation de médecin tout en s'engageant en politique. Il participe à vingt ans, en 1933, à la fondation du Parti socialiste chilien.

    En 1939, il devient ministre de la Santé dans un gouvernement de Front populaire et tente d'imposer par la loi la stérilisation des malades mentaux !... Avant d'être mise en oeuvre par Hitler et donc disqualifiée, cette démarche eugéniste était en effet présentée par les milieux progressistes, de la Suède au Chili, comme une évidence.

    Il échoue une première fois à l'élection présidentielle en 1952, à la tête d'une coalition de gauche, le FRAP (Front d'action populaire), puis une nouvelle fois (d'extrême justesse) en 1958. Il se console avec la présidence du Sénat où se fait jour son sens du dialogue et du compromis.

    Une troisième fois candidat à la présidence en 1964, il échoue face à Eduardo Frei. La quatrième tentative, six ans plus tard, sera la bonne.

     

    De la droite réformiste à la gauche révolutionnaire

     

    Le 26 février 1964, Eduardo Frei, candidat démocrate-chrétien, est élu à la présidence de la République sur un programme réformiste qui a les faveurs de l'Église, la «Révolution dans la liberté» (partage des terres, nationalisation des mines de cuivre qui font la richesse du pays...). 

     

    Le nouveau président établit aussi des relations diplomatiques avec Fidel Castro, toutes choses qui ont l'heur d'irriter le patronat chilien et plus encore les États-Unis. Dans le même temps, ses réformes entraînent une surenchère à gauche où se développent des mouvements révolutionnaires violents d'inspiration guévariste, trotskyste ou maoïste, tel le MIR (Mouvement de la gauche révolutionnaire).

     

     

    En prévision des élections suivantes, Salvador Allende prend la tête d'une coalition de gauche, l'Unité populaire (UP), , qui va du parti radical (centre réformiste) à cette extrême gauche révolutionnaire en passant par les communistes. Le parti socialiste de Salvador Allende se situe lui-même plus à gauche que le parti communiste et aspire à rien moins qu'à la rupture avec le capitalisme.

     

    Le 4 septembre 1970, il est élu à la présidence de la République avec 36,3% des suffrages, face à deux candidats de droite : Jorge Alessandri, candidat du Parti national, qui a obtenu 35% des suffrages, et le démocrate-chrétien Radomiro Tomic (27,8% des suffrages), lâché par le patronat et les États-Unis.

     

    En l'absence de majorité absolue et faute d'un deuxième tour qui départagerait les deux candidats arrivés en tête, la Constitution confie au Sénat le soin d'arbitrer l'élection. C'est ainsi que les sénateurs démocrates-chrétiens joignent leur voix à la gauche pour valider l'élection de Salvador Allende. Ils espèrent la poursuite des réformes d'Eduardo Frei dans le respect des règles démocratiques.

     

    Pour la première fois, un marxiste accède par les urnes à la tête d'un pays d'Amérique latine. C'est un électrochoc dans l'opinion internationale et en particulier dans la gauche française, où l'on se prend à rêver à l'impensable : l'établissement d'une société communiste par la voie constitutionnelle...

     

    Une présidence fragile

     

    En dépit d'un électorat minoritaire et d'une coalition hétérogène, les premiers mois du nouveau président sont euphoriques. Aux élections municipales d'avril 1971, la gauche remporte 49,75% des suffrages.

     

    La nationalisation des mines de cuivre, engagée par le précédent président, est votée à l'unanimité. Considérant les profits exorbitants réalisés par les anciens propriétaires, les parlementaires s'abstiennent de les indemniser. Les autres grandes entreprises du pays sont également nationalisées. La réforme agraire est menée à son terme. Les salaires sont augmentés et les prix bloqués. 

     

    – L'extrême-gauche contre Allende :

    Ces mesures sociales de Salvador Allende sont toutefois jugées trop modérées par  l'extrême-gauche révolutionnaire (MIR), qui s'engage dans l'action violente.  Le 8 juin 1971, un commando assassine l'ancien ministre de l'Intérieur d'Eduardo Frei, Edmundo Perez Zujovic.

     

    Dans le sud du pays, contre l'avis des communistes eux-mêmes, des militants exproprient d'office les propriétaires terriens en-dehors de toute légalité. Les propriétaires se défendent tant bien que mal avec l'aide d'un groupe paramilitaire d'extrême-droite («Patrie et Liberté»).

     

    La relance de la consommation populaire et le blocage des prix entraînent d'autre part de premières pénuries. Les prix flambent et le marché noir s'installe.

     

    Le pays est bientôt paralysé par des grèves à répétition, dont celle des camionneurs, qui paralysent le pays pendant trois semaines, en octobre 1972, en bloquant la route panaméricaine, colonne vertébrale qui court du nord au sud sur près de quatre mille kilomètres.

     

    En novembre 1972, Fidel Castro s'en vient visiter le Chili pendant plusieurs semaines, distribuant ses conseils à tout va, au risque d'irriter les Chiliens. À peine est-il parti que les ménagères descendent dans la rue en agitant des casseroles vides pour protester contre les pénuries alimentaires.

     

    – La droite contre Allende :

    Salvador Allende doit simultanément faire face à une opposition de droite majoritaire au Parlement. Elle est soutenue en sous-main par les agents secrets de la CIA américaine et financée par les multinationales implantées dans le pays, au premier rang desquelles figure le trust de télécom ITT.

     

    Le président américain Richard Nixon et son Secrétaire d'État Henry Kissinger, empêtrés dans le bourbier vietnamien, craignent la réédition d'un coup d'État prosoviétique à la façon de Fidel Castro, à Cuba, dix ans plus tôt. Ils appellent au boycott du cuivre chilien. Le prix du minerai s'effondre, ce qui détériore la balande commerciale du pays.

     

    L'extrême-droite commet un attentat meurtrier contre le commandant en chef de l'armée de terre, le général René Schneider, fidèle soutien du président.

     

    – L'armée au secours d'Allende :

    Pour faire face aux menaces qui l'assaillent de toutes parts, Salvador Allende appelle les militaires à son secours.

     

    Se méfiant à juste titre de l'armée de l'air et de la marine, aux traditions aristocratiques, il se repose sur l'armée de terre, légitimiste et au recrutement plus populaire.

     

    Il lui donne un nouveau commandant en chef en la personne du général Carlos Prat (57 ans). Celui-ci nomme à ses côtés, comme chef d'état-major, un général falot de 58 ans, peu suspect d'activisme, issu d'un milieu populaire et franc-maçon comme le président, un certain Augusto Pinochet.

     

    En novembre 1972, Carlos Prats devient ministre de l'Intérieur tandis que Pinochet le supplée à la tête de l'armée de terre comme chef d'état-major.

     

    Aux élections législatives du 27 mars 1973, l'UP (gauche) obtient le score appréciable de 43,9% des suffrages. Carlos Prats et les autres militaires du gouvernement sont remplacés par des civils mais le pays est désormais coupé en deux.

     

    La démocratie-chrétienne se rapproche du Parti national et il s'en faut de peu que la droite parlementaire n'arrive à réunir la majorité des deux tiers qui lui permettrait de destituer le président.

     

    En avril 1973, les grévistes de la mine de cuivre d'El Teniente manifestent contre le gouvernement avec les étudiants de l'Université catholique de Santiago ! Plus grave encore, le 29 juin 1973, un groupe d'officiers tente de se mutiner à la tête du principal régiment de blindés de Santiago.

     

    Le 9 août 1973, Salvador Allende rappelle les militaires au gouvernement. Il nomme Carlos Prats au ministère de la Défense mais dès le 23 août suivant, celui-ci, humilié et découragé, démissionne de toutes ses fonctions. Il est remplacé par Augusto Pinochet à la tête de l'armée de terre.

     

    Le président ne voit plus d'autre issue que dans un référendum qui lui permettrait, en cas d'échec, de démissionner avec les honneurs. Mais Pinochet, qui a rejoint le camp des putschistes, ne lui laissera pas le temps de l'organiser.

     

    Le 11 septembre 1973, il supervise un soulèvement militaire qui conduit Salvador Allende au suicide et plonge le Chili dans la terreur.

    SALVADOR ALLENDE

    (Herodote.net)


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  • 22 avril 1915 et 12 juillet 1917La guerre chimique

     

    LES ARMES CHIMIQUES

    Le 22 avril 1915, près du village flamand de Langemarck, dans le secteur d'Ypres, les soldats britanniques voient venir en provenance des tranchées allemandes un épais nuage d'un vert jaunâtre.

     

    Ils s'enfuient vers l'arrière. Plusieurs centaines s'effondrent et quelques milliers vont demeurer handicapés à vie ou pendant plusieurs mois. Atteints par le chlore, un gaz suffocant qui agresse les voies respiratoires, ils sont les premières victimes de la guerre chimique.

     

    Deux ans plus tard, dans la nuit du 12 au 13 juillet 1917, toujours dans le secteur d'Ypres, la guerre chimique franchit un nouveau seuil dans l'horreur avec l'usage par les Allemands des premiers obus remplis de gaz moutarde. Ce gaz vésicant est ainsi nommé d'après son odeur. On le surnommera aussi très vite «ypérite», en relation avec Ypres. Très agressif, il n'attaque pas seulement les voies respiratoires mais aussi la peau, ce qui complique beaucoup les protections.

     

     

    Arme tactique

     

    Quand éclate la Grande Guerre en août 1914, les stratèges privilégient l'offensive mais, dès octobre 1914, les troupes s'enterrent dans des tranchées. Dans les états-majors, cette immobilité est insupportable. Dès lors, on se met en quête d'un moyen de percer le front et l'on songe aux gaz.

     

    L'Allemagne a l'avantage d'être le N°1 mondial de la chimie dans le monde... C'est pourquoi elle va avoir le douteux honneur de lancer la première attaque chimique à Langemarck. L'objectif est de «nettoyer» les tranchées ennemies en vue de percer enfin le front et de reprendre la guerre de mouvement tant prisée des états-majors.

     

    Les soldats allemands du secteur reçoivent donc les bonbonnes de chlore liquide et les ouvrent quand le vent est enfin favorable. Le chlore se vaporise instantanément et s'échappe vers l'ennemi. Tout en se protégeant la bouche et les narines avec un tampon humide, ils se lancent à l'assaut dans la foulée. Les soldats britanniques, surpris, désertent immédiatement leurs tranchées et les les Allemands progressent en quelques heures de plusieurs centaines de mètres. Mais faute de renforts en nombre suffisant, ils sont bloqués dès le lendemain par la troisième ligne de défense ennemie.

     

    Une nouvelle attaque chimique allemande, dans le même secteur, dans la nuit du 22 au 23 mai 1915, se solde par un échec car les Britanniques, remis de leur surprise, ont déjà pu se doter de tampons protecteurs et faire front à l'assaut.

     

    Côté britannique, le major Charles Foulkes prépare la riposte. La première attaque britannique a lieu à Loos, près de Lille, le 25 septembre 1915. L'effet de surprise est total et permet en certains endroits aux troupes d'assaut britanniques d'avancer de cinq kilomètres. Mais comme à Langemarck, le résultat final est mitigé.

     

    Pendant les deux années qui suivent, sur le front occidental et, dans une moindre mesure, sur le front russe, les belligérants vont poursuivre les attaques au chlore. Mais les résultats tactiques ne sont pas au rendez-vous et les états-majors se désintéressent peu à peu de cette arme.

     

    LES ARMES CHIMIQUES

    Arme d'usure et d'attrition

     

    Poursuivant leurs recherches, les Allemands reviennent à l'idée d'obus chimiques et mettent au point un gaz vésicant (qui attaque la peau) très toxique, le sulfure d'éthyle dichloré (ou «gaz moutarde»).

     

    Le moment propice arrive en juillet 1917 et ce sont une nouvelle fois les Britanniques du secteur d'Ypres qui font les frais de l'expérimentation.

     

    L'artillerie allemande déclenche le bombardement chimique pendant la nuit. Sur le moment, les Britanniques ne ressentent rien de plus qu'une légère odeur piquante de moutarde. Mais au lever du jour, ils se réveillent avec des douleurs intolérables et des cloques et brûlures sur tout le corps.

     

    Près de quinze mille fantassins sont atteints, avec des séquelles graves et durables. Un demi-millier succombent. C'est autant que de victimes britanniques des gaz dans l'année précédente.

     

    Malgré l'extrême dangerosité de leur fabrication et de leur manipulation, les obus d'ypérite vont désormais relancer la guerre chimique et en devenir le principal vecteur.

     

    Il ne s'agit plus pour les belligérants de percer le front mais d'user l'adversaire, tant au physique qu'au moral. D'arme tactique, les gaz deviennent une arme d'usure ou d'attrition. Le but est assez largement atteint.

     

    Dans tous les camps, les fantassins se voient contraints de porter à chaque alerte des équipements de protection et des masques qui gênent leurs mouvements et aggravent encore un peu plus leurs conditions de vie. Il arrive que, de lassitude, ils les enlèvent trop tôt après l'alerte, au risque d'être touchés par le gaz. Qui plus est, l'ypérite ne produisant ses effets délétères qu'après plusieurs heures, chacun vit dans l'angoisse d'avoir été touché à son insu au début de l'alerte.

     

    Dans la dernière année de la guerre, sur le front occidental, un tiers des obus allemands ont une composante chimique (pas forcément de l'ypérite). La proportion est moindre chez les Alliés franco-britanniques pour la simple raison que ceux-ci n'ont pas autant de ressources industrielles.

     

    Le bilan humain de la guerre chimique évoqué par l'historien Olivier Lepick est d'environ cinq cent mille tués et blessés sur le front occidental et au moins deux cent mille sur le front russe. C'est environ 3% des pertes totales de la Grande Guerre (dont vingt mille tués, somme toute assez peu).

     

     

    Épilogue (?)

    L'échec tactique de l'arme chimique et le souvenir de ses horreurs vont conduire les grandes puissances à renouveler son interdiction.

    Un «protocole concernant la prohibition d'emploi à la guerre de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires et de moyens bactériologiques» est signé le 17 juin 1925, à Genève, dans le cadre d'une conférence internationale sur le commerce des armes. À vrai dire, ce protocole de Genève, sans caractère coercitif, ne va pas avoir d'effet concret.

    Le gaz, comme arme de terreur, a pu être employé, dans des conditions heureusement restreintes, dans la guerre du Rif ainsi que dans la guerre sino-japonaise et l'invasion de l'Éthiopie dans les années 1930.

    D'importants stocks d'armes chimiques ont été aussi constitués par les belligérants de la Seconde Guerre mondiale sans être utilisés. Il est vrai qu'ils avaient mieux à faire avec les recherches sur la bombe atomique, une arme de destruction massive et de terreur autrement plus puissante, qui a abouti à la destruction d'Hiroshima et Nagasaki.

    Après le précédent de la Grande Guerre, l'arme chimique est employée à grande échelle dans la guerre du Vietnam, à l'initiative des États-Unis, dans les années 1960.

    Le corps expéditionnaire américain bombarde massivement la jungle et les rizières avec du napalm, qui brûle les habitations, et un défoliant, l'«agent orange», qui détruit la végétation et est supposé mettre les combattants ennemis à découvert. Les civils brûlés ou intoxiqués sont les victimes collatérales de ces bombardements.

    Dans les années 1980, l'arme chimique refait surface à l'initiative du dictateur Saddam Hussein. Celui-ci l'emploie contre les Kurdes de son propre pays, à Halabja, le 16 mars 1988. L'attaque fait plusieurs milliers de victimes parmi les civils.

    Les grandes puissances ne sont pas pour autant troublées, les médias se tiennent coi et l'opinion internationale regarde ailleurs. C'est que l'Irak est le fer de lance de l'Occident et des Soviétiques face à l'Iran auquel il livre depuis huit ans une guerre impitoyable, la plus meurtrière qu'ait connue le Moyen-Orient depuis les Mongols.

    Sans doute pris de remords, les représentants de la quasi-totalité des États signent à Paris, le 13 janvier 1993, une Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'usage des armes chimiques et sur leur destruction.

    Autrement plus contraignante que le protocole de Genève de 1925, cette convention a été sciemment violée par le gouvernement syrien, qui a bombardé avec des gaz la banlieue de Damas, le 21 août 2013, occasionnant plusieurs centaines de morts dans la population civile.


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  • LES BIENHEUREUX MARTYRS DE 1792

     

    2 SEPTEMBRE 1792 : LES BIENHEUREUX MARTYRS DES CARMES

     

    L'UN DES LIEUX D'EXÉCUTION

    Le 2 septembre 1792, un peu plus de cent personnes, en grande majorité des prêtres et religieux, sont massacrés dans les jardins et actuels bâtiments du Séminaire des Carmes.

     

     

    Premières persécutions

     

    Sous la Révolution, la vie des religieux n’est guère troublée avant octobre 1790, lorsque les vœux religieux sont interdits. Quelques-uns des frères carmes quittent alors le couvent, pendant que d’autres sont accueillis, venant de couvents parisiens fermés.

    Les persécutions s’intensifient en 1791. En avril 1792, ce sont finalement toutes les congrégations religieuses qui sont interdites. Une fois encore, plusieurs frères partent se réfugier en province ou émigrent.

     

    La prison

     

    Le 11 août 1792, le lendemain de la chute de la monarchie, l’église Saint Joseph des Carmes est transformée en dépôt pour les prêtres réfractaires arrêtés. Environ cent cinquante prêtres et dix laïcs y sont enfermés dans des conditions de vie précaires.

    En effet, depuis la condamnation de la Constitution civile du Clergé par Pie VI en avril 1791, le clergé français s’est divisé entre jureurs et réfractaires. Ces derniers, fidèles au Pape, sont alors contraints d’entrer dans la clandestinité. Nombre d’entre eux, venant de toute la France en habit civils, optent pour l’anonymat de la capitale. Ils sont particulièrement nombreux à se retrouver dans le quartier de Saint-Sulpice où beaucoup d’entre eux ont suivi leur formation au Séminaire qui jouxte l’Eglise.

     

    Les massacres du 2 septembre 1792

     

    Le 2 septembre, alors que les Prussiens marchent sur Paris, le tocsin attise la violence des révolutionnaires de la capitale. Vers 16 h, un groupe de forcenés en armes pénètre dans le jardin pendant la promenade et massacre pendant quinze minutes plusieurs prêtres et deux évêques.

    Puis les commissaires de la section du Luxembourg organisent un simulacre de procès, demandant à chaque prisonnier de prêter serment ; à chaque réponse négative, le prêtre est exécuté à l’arme blanche. Après deux heures, environ 115 cadavres s’entassent dans le parc, jetés dès le lendemain dans un puits ou dans le cimetière de Vaugirard.

     

     

    Aujourd’hui

     

    La crypte des martyrs

    La crypte de l’église Saint Joseph des Carmes abrite de nombreux ossements retrouvés au XIXe siècle. Plusieurs autres souvenirs du massacre sont répartis dans le séminaire : le perron où a eu lieu une partie des exécutions, une salle où le mur garde la trace des baïonnettes ensanglantées. Et quelques lieux où des prisonniers ont pu se cacher.

    Des visites sont organisées régulièrement, vous pouvez contacter le Séminaire pour en organiser une.

     

    Le site de l’association du souvenir des martyrs de 1792Un contenu très riche, beaucoup de textes de témoins, quelques uns d’hagiographes postérieurs. On y trouve aussi des informations sur l’église Saint Joseph des Carmes.Un récit datant de la fin du XIXe siècle

     

    2 SEPTEMBRE 1792 : LES BIENHEUREUX MARTYRS DES CARMES

    CRYPTE DES MARTYRS

    (Source : Wikipedia)

     

     


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  • Syrie : Un héritage de la Grande Guerre

     

    SYRIE : LA GUERRE CIVILE

    Modeste survivance du passé, la Syrie actuelle est issue du démembrement de la Syrie antique, aujourd'hui divisée en plusieurs États rivaux : la Syrie proprement dite, le Liban, Israël et la Palestine, ainsi que la Jordanie. Ce démembrement est le résultat de la Grande Guerre de 1914-1918.

     

    Les Syriens cultivent le souvenir lointain de l’époque omeyyade, quand Damas était la capitale de l’empire arabe à son apogée.

     

    Ils ne pardonnent pas à la France et à la Société des Nations d’avoir détaché le Liban de leur pays en 1922 et rattaché à la Turquie l’une de leurs plus illustres cités, qui est aussi le berceau du christianisme : Antioche-sur-l’Oronte (Antakya en turc).

     

    Le pays lui-même est fractionné entre plusieurs communautés linguistiques et religieuses qui vivent dans une entente précaire. Leurs rapports compliqués avec l'État syrien comme avec les États voisins expliquent la férocité de la guerre civile de 2012.

     

    André Larané

     

    Cinquante siècles de mémoire

     

    SYRIE : LA GUERRE CIVILE

    La Syrie s’étend sur 186.000 km2 (le tiers de la France) et compte 23 millions d'habitants (2011). Traversé par les deux grands fleuves mésopotamiens, le Tigre et l’Euphrate, l’est du pays prolonge le désert arabique. L’ouest, verdoyant et montagneux (djebel Druze, mont Hermon, anti-Liban, djebel Alaouite), est le témoin plaisant de l’ancien Croissant fertile.

    Situé au confluent de tous les grands empires méditerranéens, de l’Assyrie à l’empire ottoman, en passant par Babylone, la Perse, Alexandre, Rome, Byzance et l’empire arabe, le pays conserve de son passé un très riche patrimoine.

    Cinq sites antiques ont été classés par l’UNESCO au patrimoine mondial de l'humanité : les anciennes villes d'Alep et Bosra, le Krak des Chevaliers et le château de Saladin, Palmyre et les «villes mortes» du Nord de la Syrie. Nous vous invitons à découvrir ces sites et bien d’autres… [découvrir le patrimoine syrien]

    Instabilité, divisions et oppression

     

    Le 3 octobre 1918, l’émir Fayçal, fils du chérif hachémite de La Mecque, fait une entrée triomphale à Damas, acclamé par les nationalistes arabes, désireux de secouer l’oppression ottomane et de renouer avec leur glorieux passé.

     

    Le 11 mars 1920, un congrès national désigne Fayçal roi d’une «Grande-Syrie», étendue du Sinaï à la Turquie.

     

    Mais l’illusion ne dure pas. En vertu des accords secrets Sykes-Picot, les Britanniques renient leur promesse d’un royaume arabe indépendant. Ils mettent la main sur la Palestine et la Transjordanie. De leur côté, les Français obtiennent le 28 avril 1920 un «mandat» en Syrie et au Liban. Il s’agit d’un protectorat de fait cautionné par la Société des Nations (SDN), ancêtre de l'ONU.

     

    La Syrie - ou ce qui en reste - est partagé administrativement par les Français en quatre «États» : Damas, Alep, l'État du djebel Druse et l'État des Alaouites, ou État de Lattaquié.

     

    Les révoltes locales, notamment dans le djebel Druse, et les revendications des intellectuels nationalistes, notamment chrétiens, amènent en septembre 1936 le gouvernement de Léon Blum à promettre l’indépendance mais celle-ci se fera attendre dix ans.

     

    Pendant la Seconde Guerre mondiale, le général Dentz, haut-commissaire du gouvernement de Vichy, autorise les avions de la Luftwaffe allemande à utiliser les aérodromes syriens. En conséquence de quoi les Anglais attaquent le pays à partir de la Palestine le 8 juin 1941, avec des combattants de la France libre et également des colons sionistes de Palestine.

     

    À la fin de la guerre, le général de Gaulle tente une dernière fois de sauver le mandat français, non sans appréhension. Ainsi qu'il écrit dans ses Mémoires de guerre (L'Appel) à propos d'un voyage au Liban : «Vers l’Orient compliqué, je volais avec des idées simples. Je savais qu'au milieu de facteurs enchevêtrés une partie essentielle s'y jouait. Il fallait donc en être»... Il fait bombarder Damas le 29 mai 1945 avant de devoir s’incliner sur les injonctions de Churchill. La Syrie proclame enfin son indépendance le 17 avril 1946.

     

    SYRIE : LA GUERRE CIVILE

    Les putschs militaires se succèdent jusqu’à la création en février 1958 d’une fédération avec l’Égypte de Nasser : la République Arabe Unie (RAU). Ce rêve nationaliste ne dure pas. Dès septembre 1960, la Syrie reprend son indépendance à la suite d’un nouveau coup d’État.

     

    Les militaires, inspirés par l’idéologie socialiste et laïque du parti Baas, né en 1942, multiplient les nationalisations puis, en 1967, s’engagent dans la guerre des Six Jours contre Israël. Ils essuient une défaite honorable mais perdent le plateau du Golan.

     

     

    En novembre 1970, un dernier coup d’État donne le pouvoir au général Hafez el-Assad, qui se présente comme les précédents sous l'étiquette du Baas. Il va se maintenir jusqu’à sa mort, le 10 juin 2000, à 69 ans, et léguer le pouvoir à son fils cadet, Bachar el-Assad.

     

    Cette «performance» tient à l’inflexibilité du dictateur. Il en fait la démonstration avec la répression de l’insurrection des Frères musulmans à Hama, en février 1982. Les militaires bombardent la ville à l’arme lourde puis la pillent sans vergogne, sans souci de distinguer entre les insurgés et les simples civils. Le nombre de victimes est évalué à près de 30.000.

     

    Après quoi, le dictateur permet à chacun de visiter les ruines et de se rendre compte de ce qu’il en coûte de lui résister… La leçon a été retenue par son fils qui l’applique à Homs, trente ans plus tard, jour pour jour.

     

    Mosaïque religieuse et «printemps arabe»

     

    Les Syriens parlent l’arabe à l'exception de la minorité kurde du nord-est (5 à 10% de la population). Ils se signalent par leur diversité religieuse, reliquat d’un passé très agité.

     

    Les musulmans sunnites sont très majoritaires (75 à 80% de la population, y compris les Kurdes). Mais ils doivent compter avec d’autres minorités musulmanes très attachées à leur identité et qui se rattachent plus ou moins au chiisme : les Druzes du sud et surtout les Alaouites de la région de Lattaquié, sur le littoral méditerranéen et dans la montagne du même nom, le Djebel Alaouite.

     

    Hafez el-Assad et son fils Bachar, l’actuel dictateur, tout comme beaucoup de cadres du régime et d’officiers de l’armée, appartiennent à la minorité alaouite, apparentée aux chiites. Cela explique le soutien appuyé de la République islamique d’Iran au régime syrien. La Syrie d’Assad appartient à ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler «l’arc chiite» (ensemble des pays à majorité chiite ou dirigés par des chiites : Iran, Irak, Bahrein, Syrie et Liban).

     

     

    Il faut compter aussi avec les nombreuses confessions chrétiennes (aujourd'hui à peine 5 à 10% de la population totale). Les chrétiens constituent des minorités très actives et bien intégrées en milieu urbain. Ils sont divisés entre de nombreuses confessions rivales dont les unes remontent aux premiers temps du christianisme (syriaques jacobites, assyriens et arméniens par exemple), d’autres aux temps modernes (il s’agit de chrétiens d’Orient qui ont fait allégeance au patriarcat de Constantinople ou au pape de Rome : chaldéens, maronites…). Plusieurs de ces communautés continuent de pratiquer l’araméen, l’antique langue de la région.

     

    SYRIE : LA GUERRE CIVILE

    Au début du XXe siècle, plus instruits et plus ouverts aux idées occidentales que les musulmans, les chrétiens ont été à la pointe du nationalisme arabe. C’est par exemple un chrétien, Michel Aflak, qui a créé en 1942 le parti Baas (la résurrection en arabe), socialiste et laïc, qui a conquis le pouvoir en Irak et en Syrie dans les années 1960, avant d’être dévoyé par les dictateurs Saddam Hussein et Hafez el-Assad.

     

    Mais l’émigration, depuis un siècle, a réduit le nombre des chrétiens à un million environ. Les chrétiens, comme les autres minorités, ne bénéficient plus, en effet, des protections juridiques accordées aux différentes communautés (ou «millets») par le sultan ottoman.

     

     

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